Claudine à l’école, Colette : l’histoire d’une classe d’un autre temps


Claudine à l’école – Résumé

1900. Claudine a 15 ans et s’apprête à vivre sa dernière année de collège avant le redouté brevet élémentaire qui couronne la fin de la scolarité pour beaucoup de jeunes filles.

Dans le petit village de 1950 habitants où elle habite – Montigny-en-Fresnois, Claudine se sent parfaitement à son aise : elle connaît le moindre recoin de Montigny et cultive l’image d’une jeune fille intelligente mais un brin insolente !

Elle raconte son quotidien, dans une école en travaux où se déroule une foule de péripéties : les histoires d’amour des maîtres et maîtresses, les taquineries (et vacheries) entre copines, jusqu’à la fin de l’année et l’examen qui marquera (ou pas) l’entrée dans le monde des grandes.


Auteur.
Taille du livre252 pages.
Note – ★★★☆☆

Claudine à l'école, Colette

Claudine à l’école – Avis sur le livre

Claudine a commencé par une histoire bien mystérieuse. Nous sommes en 1900… Henri Gauthier Villars, surnommé Willy, annonce avoir reçu le journal d’une écolière qui n’a pas voulu révéler son véritable nom : Claudine à l’école. En réalité, le manuscrit a été écrit par sa femme, Colette.

Evidemment, cette mystérieuse inconnue racontant son quotidien d’adolescente suscite beaucoup d’intérêt, et Willy pousse Colette à écrire plusieurs romans complémentaires (Claudine à Paris, publié en 1901 ; Claudine en ménage, publié en 1902 ; Claudine s’en va, en 1903). Colette se sépare finalement de Willy en 1906. Vous trouverez donc souvent des éditions du livre signées « Colette et Willy » même si, en réalité, Colette est l’auteur de toutes les aventures de Claudine.

Mais qui est donc Claudine ? C’est une jeune fille de 15 ans, qui vit dans un tout petit village de moins de 2000 habitants, Montigny-en-Fresnois. Elle habite avec son père (on ignore où est sa mère mais Claudine dit « si j’avais une maman », ce qui laisse entendre qu’elle est décédée ou partie). Le père, lui, a une passion (un peu étrange, il faut l’avouer !) pour les limaces… et cet homme assez distrait lui laisse beaucoup de liberté !

De ce fait, Claudine est délurée, parfois jusqu’à l’insolence. Elle est aussi une jeune fille intelligente et curieuse, qui passe beaucoup de temps à se plonger dans la vaste bibliothèque de son père. Elle a choisi de fréquenter l’école du village au lieu d’être envoyée dans une pension pour enfants bourgeois (ce que les revenus de son père lui auraient permis de faire).

Montigny est une ville très pauvre et la plupart des enfants sont des fils et filles de fermiers. Mais Claudine aime cet endroit où elle se sent libre, où elle peut se promener dans les bois en laissant vagabonder son imagination… Les descriptions sont d’ailleurs superbes et vous font tout de suite imaginer les lieux.

« Quelquefois des pluies d’orage vous surprennent dans ces grands bois-là ; on se blottit sous un chêne plus épais que les autres, et, sans rien dire, on écoute la pluie crépiter là-haut comme sur un toit, bien à l’abri, pour ne sortir de ces profondeurs que tout éblouie et dépaysée, mal à l’aise au grand jour ».

Lire Claudine à l’école, c’est plonger dans une époque qui n’existe plus. Claudine vit sa dernière année de « collège »… mais évidemment, elle n’a rien à voir avec celle des collégiens d’aujourd’hui.

Claudine à l'école, Colette

D’abord, elle fréquente la seule école du village. Une école en plein chamboulement car on est en train de détruire l’ancienne école pour en construire une nouvelle… et les élèves sont déplacés d’une classe à l’autre dans un joyeux chambardement !

A l’époque, beaucoup d’élèves sont pensionnaires et dorment dans des dortoirs, avec un surveillant dans le dortoir. Les instituteurs ont leur chambre au premier étage de l’école. Il y a des maîtres et maîtresses mais aussi des « sous-maîtres » et « sous-maîtresses » pour tenir les petites classes et assurer certains cours.

C’est une époque où la difficulté des cours n’a rien à voir avec celle d’aujourd’hui. Les élèves travaillent sur des problèmes mathématiques complexes, doivent avoir une connaissance approfondie de l’histoire, maîtriser la musique et savoir écrire à la perfection, sans oublier les « travaux d’aiguille » que toutes les jeunes filles doivent savoir faire : coudre, broder, etc.

Colette raconte l’histoire avec la voix de Claudine, on plonge donc véritablement dans ses pensées d’adolescente et très vite, le style unique de l’auteur se détache. Je sais que certains collégiens étudient Claudine à l’école et ça ne m’étonne pas car il y a tout ce que les profs de français adorent : des figures de style et j’en passe ;)

Par exemple, Claudine a un langage très imagé : elle essaie toutes les comparaisons (« elle aime le bien-être comme une chatte qui a froid »), elle parle de « petites grandes filles » (ce qu’on appelle un oxymore : on rapproche deux termes contradictoires) et elle ne perd pas une occasion de se moquer comme on peut le faire à l’adolescence ;) Par exemple, Claudine se moque souvent des autres en employant le « ça » à la place du « elle(s) ».

« Ces petites grandes filles m’agacent, ça a peur de se déchirer aux ronces, ça a peur des petites bêtes, des chenilles velues et des araignées des bruyères, si jolies, rondes et roses comme des perles, ça crie, c’est fatigué – insupportables enfin ».

Dans la classe de Claudine, il y a notamment « la grande Anaïs », drôle et maline ; les soeurs Jaubert, des jumelles dont Claudine est jalouse sans vouloir l’avouer parce qu’elles travaillent bien et se montrent sages comme des images (« ça travaille toujours, c’est plein de bonnes notes, c’est convenable et sournois, ça souffle une haleine à la colle forte, pouah ! ») ; Marie Belhomme, pas bonne élève pour un sou mais toujours gaie…

Et puis, il y a les adultes : la laide institutrice Mademoiselle Sergent, la petite sous-maîtresse Aimée… et les maîtres ! Sans oublier le délégué cantonal Dutertre qui vient souvent « surveiller » les progrès des élèves.

Ce qui frappe, ce sont les rapports entre ces élèves et les adultes : il y a ces adultes qui profitent de leur pouvoir pour avoir un comportement très limite avec les adolescentes ; il y a parfois un écart d’âge TRÈS faible entre les « grandes » de l’école et les sous-maître(sse)s, ce qui favorise des rapports presque égaux. Ça autorise à flirter un peu… et même à explorer sa « sexualité ». Claudine tombe ainsi sous le charme de la petite Aimée, institutrice adjointe au charisme irrésistible.

On ne parle pas de coucheries : d’une part, les filles restent très jeunes ; d’autre part, c’est une époque où « ça ne se fait pas ». Mais le roman de Colette évoque un couple lesbien, des attirances pas toujours très définies entre femmes… L’adolescence est aussi ce moment où l’on se cherche et Claudine n’échappe pas à la règle. On se demande souvent si elle joue ou si elle est sérieuse dans ses amours mais cette bisexualité est bien présente.

Il se trouve que Colette elle-même était bisexuelle. Elle a épousé des hommes mais a aussi eu des liaisons avec des femmes, dont une liaison célèbre avec la Marquise de Belbeuf. Les deux femmes se sont même embrassées publiquement au Moulin Rouge, déclenchant un véritable scandale.

Ce qui est intéressant, c’est finalement l’absence de définition posée sur ces événements de l’adolescence : Claudine ne pose pas d’étiquettes sur sa sexualité et c’est très bien ainsi. Elle vit les choses comme elles se présentent, sans trop « prendre de distance », exactement comme on peut le faire à l’adolescence.

Claudine à l’école est vraiment un livre unique car il vous plonge dans l’atmosphère de cette école d’autrefois… qui, personnellement, me fascine et exerce sur moi une véritable séduction. Si je ne mets pas une note plus élevée à cette lecture, c’est parce que Claudine elle-même a fini par m’agacer au fil des pages.

Elle est parfois franchement méchante : face à une jeune fille toute effacée et timide qui l’apprécie énormément, elle se montre détestable, déchirant une lettre écrite avec sincérité, frappant sa camarade… Je la trouvais attachante (ou « attachiante » !) au début du roman. A la fin, je la trouvais insupportable !

Et pourtant, j’avoue que je reste avec l’envie de savoir ce que va devenir cette jeune fille insolente et sans gêne… Claudine à Paris, la suite de Claudine à l’école, devrait donc s’ajouter à la liste de mes futures lectures !


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