10e chambre : Instants d’audience – Résumé
En 2003, Raymond Depardon a posé ses caméras dans la salle d’audience d’un tribunal correctionnel.
Sur 169 affaires filmées, il en a sélectionné une douzaine, qui sont montrées dans ce documentaire. Une façon de lever le voile sur la manière dont la justice est rendue en France.
Une justice qui n’est ni spectaculaire, ni hollywoodienne mais qui est celle des délits communs : des vols, des ports d’arme non autorisés, des conduites en état d’ivresse, etc. Ses caméras nous montrent les débats sans mise en scène : l’exposé de l’affaire, les explications du prévenu, les réquisitions puis le verdict…
Réalisateur – Raymond Depardon.
Durée du film – minutes.
Note – ★★★★☆
Instants d’audience – Critique
Parmi les prévenus présentés dans ce documentaire, on retrouve justement un large éventail de profils.
Par exemple, cette femme, artiste peintre, qui n’a jamais eu d’ennuis avec la justice mais a fait l’erreur, après un dîner un peu arrosé, de reprendre le volant pour rentrer chez elle. Ou cet homme, accusé d’avoir harcelé et menacé son ex-compagne après leur rupture.
Mais aussi cet homme, qui s’était mal garé rue de Rivoli à Paris et, énervé, a insulté la policière qui voulait contrôler ses papiers. Un autre a été arrêté en situation irrégulière sur le territoire français, tandis qu’on retrouve aussi un pickpocket du métro, un possesseur de carabine en toute illégalité, un dealer de cannabis…
Au fil des affaires présentées, on se laisse emporter par les témoignages : la mauvaise foi des uns, la colère des autres, les maladresses verbales… C’est un documentaire très simple, sans artifice, mais qui reflète avec justesse ce que j’ai pu voir en allant « pour de vrai » assister à des audiences au Palais de Justice.
Chaque jugement est présidé par une même femme, la charismatique Michèle Bernard-Requin, qui à mes yeux constitue la colonne vertébrale du documentaire : ses paroles sont précises, reflétant sa droiture, elle oriente ou recadre les débats avec énergie et rigueur.
Quant aux avocats, je les ai trouvés très inégaux. Vous imaginez bien que je ne vais pas citer de noms, j’ai aimé ce documentaire mais pas au point d’aller comparaître pour diffamation au Palais de Justice ;) Mais disons que certains vous agacent par leur lenteur, leurs circonvolutions verbales, tandis que d’autres vont droit au but, ce que j’ai préféré. Depardon a été plus franc que moi, puisqu’il a confié dans une interview : « dans l’ensemble, je l’ai vu au tournage et plus encore au montage , ces avocats commis d’office ne sont pas bons ».
De même, on constate qu’à l’instant où vous commettez un délit, la justice s’intéresse à vous dans votre globalité : revenus, antécédents, éventuels problèmes psychologiques, situation de famille. Tout est susceptible de se retrouver sous le microscope, avec parfois des jugements sur votre mode de vie, vos dépenses, etc.
J’ai parfois surprise par certaines maladresses, comme lorsque le Procureur déclare, au sujet de l’affaire de harcèlement : « même si les faits, on les connaît parce qu’on a connu ce genre d’affaire X et X fois, ce sont toujours des affaires douloureuses qu’il faut traiter avec précaution, comme si c’étaient des affaires extrêmement importantes ».
Je me mets à la place de la victime qui entend ça, qui entend qu’on fait « comme si c’était une affaire importante » (sous-entendu : ça ne l’est pas, par rapport à d’autres affaires plus graves) et j’avoue que ça m’a un peu choquée.
Instants d’audience nous montre en pleine lumière la dualité de la justice : son côté rigoureux, factuel, qui s’appuie sur des textes de loi standardisés… et son côté théâtral, avec de grands discours, de la culpabilisation parfois, des phrases choc, etc. C’est un documentaire qui ne manquera pas de vous captiver si vous vous intéressez au milieu judiciaire.
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