Israël-Palestine : vérités sur un conflit – Résumé
Comprendre le conflit israélo-palestinien est un défi difficile…
car il ne s’agit pas seulement d’un sujet politique, historique ou territorial. C’est aussi un sujet qui touche de près aux croyances, aux grilles de lecture diverses et propres à chacun.Alain Gresh s’efforce, à travers ce livre, de décrypter les relations complexes entre Israël et Palestine, pour les expliquer à des gens qui ont très peu de connaissances sur le sujet.
Il s’agit à la fois de revenir sur la création de l’Etat d’Israël et ses conséquences, mais aussi de comprendre pourquoi les tentatives de paix successives ont échoué, quel rôle jouent les acteurs de la scène internationale dans le conflit, ce qui a motivé les regains de violence… et où on en est aujourd’hui.
Auteur – Alain Gresh.
Taille du livre – 328 pages.
Note – ★★★★☆
Israël-Palestine : vérités sur un conflit – Critique
Pas facile de trouver par quel livre commencer pour comprendre le conflit israélo-palestinien. Quand on n’est pas historien, comment porter un regard critique sur ce qu’on lit, comment savoir si on nous oriente vers une interprétation plus qu’une autre ?
Clairement, c’est impossible. Alors si vous lisez un jour un livre sur le sujet, n’en lisez pas qu’un seul. Multipliez les sources, les auteurs, les opinions. Je suis convaincue que c’est comme ça qu’on se forge sa propre vision des choses.
Alors, dans cette critique, je ne vais pas vous dire « Alain Gresh a raison » ou « Alain Gresh dit la vérité sur le conflit israélo-palestinien ». Car je ne sais pas où est la vérité. Ce que je peux vous dire, c’est que ce livre propose un décryptage des origines du conflit et de ses conséquences. Un décryptage très pédagogique, pas à pas, construit de manière à ce que n’importe qui puisse se familiariser avec le sujet.
Dès le début du livre, Alain Gresh rappelle toute la difficulté à écrire sur Israël et la Palestine :
« Il existe déjà des centaines d’ouvrages décortiquant le conflit, son histoire et ses protagonistes. Ce n’est pas pour cela que les « spécialistes » tombent d’accord. Pourquoi ? Parce que chacun lit, consciemment ou non, ce conflit à travers des « grilles d’analyse » qui donnent un « sens » aux événements. Que répondre à quelqu’un qui proclame que la terre d’Israël a été donnée aux juifs par Dieu ? Peut-on contester la parole de Dieu ?
Une vision religieuse, fondée sur un message divin, est non négociable. Comment convaincre des élèves musulmans qui pensent que la Palestine est terre islamique et ne peut faire l’objet de marchandages ou de compromis ? »
A cette complexité liée aux enjeux religieux viennent s’ajouter des confusions : beaucoup assimilent le sionisme (en simplifiant, le sionisme relève de la politique, c’est le fait de vouloir un Etat juif à part entière) au judaïsme… alors que tous les Juifs ne sont pas sionistes.
Tout le monde n’a pas non plus la même définition de la judéité : entre les conversions reconnues par Israël et les autres, entre ceux qui sont des Juifs religieux, ceux qui sont Juifs « de descendance » mais pas pratiquants ni croyants, etc.
« Les juifs, au cours des deux derniers millénaires, n’ont été liés ni par le territoire, ni par la langue – la plupart ont adopté le parler local, l’hébreu étant limité aux cérémonies religieuses -, ni par l’Histoire – les trajectoires des juifs au Maroc ou en France ne sont en rien parallèles -, ni par les coutumes – les juifs ont embrassé les coutumes locales (en Iran, jusqu’à aujourd’hui, ils se déchaussent en entrant dans les synagogues). […]
En Europe de l’Est et en Russie aux 18e et 19e siècles, en revanche, les juifs ont acquis, ainsi que nous le verrons, des caractéristiques quasi nationales« .
On ajoute ensuite à cette complexité le spectre du passé et de la Shoah. Il pousse souvent à évoquer Israël avec la plus grande prudence, notamment dans les médias… En effet, à une époque où les actes antisémites sont réguliers, il existe une grande vigilance sur le sujet et parfois, la frontière entre débat d’idées sur Israël et antisémitisme est très mince aux yeux de certains. Alain Gresh analyse aussi, en filigrane, cette question : critiquer la politique d’Israël est-il un acte antisémite ?
L’auteur ne cache pas, d’ailleurs, qu’il réprime vigoureusement la politique actuelle d’Israël envers les Palestiniens. Il estime qu’Israël refuse toutes les concessions qui permettraient d’engager un véritable processus de paix et que les conditions de vie imposées par Israël aux civils palestiniens sont dramatiques et condamnables.
Le livre est bien fait car il explique, chronologiquement, les « grands événements » qui ont marqué l’histoire de cette région. La Palestine – largement musulmane – placée sous mandat britannique, l’immigration juive qui, sur place, s’organise rapidement en une communauté très structurée qui achète des terres, met en place des institutions… et l’émergence chez les Palestiniens d’un sentiment de se faire chasser de leurs propres terres.
L’exode massif des Juifs vers Israël après la Shoah creuse aussi le fossé des perceptions : sont-ils des réfugiés ou des colons qui viennent s’installer sur des terres palestiniennes ? Peuvent-ils être perçus à la fois comme des réfugiés et comme des colons ?
On essaie alors d’envisager différentes solutions : un Etat juif et un Etat arabe en parallèle, un Etat commun « bicéphale »… mais comment réunir deux populations si différentes ? On s’aperçoit aussi que les pays voisins et les autres ont souvent des enjeux stratégiques dans la région, qui les poussent à garder une relative inaction…
Je ne vais pas vous raconter toute l’histoire mais c’est un livre très riche, qui ouvrent beaucoup de réflexions au-delà de la description historique pure. J’ai beaucoup aimé, par exemple, cette partie de la réflexion d’Alain Gresh, dont je vous livre un petit extrait :
« Les juifs israéliens, comme les Palestiniens, sont habités par une souffrance profonde, par une peur existentielle. Pour les premiers, le génocide nazi fait partie intégrante de leur identité et ils redoutent sa « répétition » ; chaque attentat est vécu comme le signe d’une possible résurgence de la « bête immonde » que fut le nazisme […] Pour les Palestiniens, l’expulsion et le déracinement de 1948-1949 participent d’une épreuve traumatique dont ils continuent de subir les effets et dont ils craignent aussi la « répétition ».
Ces deux peurs imprègnent les protagonistes, leurs visions du monde, leurs comportements quotidiens. […] Il ne s’agit nullement de « comparer », d’une part, le génocide, la volonté qui l’accompagne d’anéantissement systématique de millions de personnes sur la base de leur religion ou de leur « race » et, d’autre part, l’expulsion, moment traumatisant pour les Palestiniens mais qui n’est pas synonyme d’une extermination, même si elle s’est accompagnée de massacres.
Par ailleurs, les deux événements ne se déroulent pas sur le même continent, n’engagent pas les mêmes acteurs, ne relèvent pas de circonstances analogues ».
Le livre « Israël-Palestine : vérités sur un conflit » m’a paru très facile d’accès pour essayer de comprendre le conflit israélo-palestinien. Il comporte aussi des plans de la région, bien précieux pour visualiser les mouvements de frontières au fil des années.
Cependant, il faut garder à l’esprit que ce n’est qu’une « brique » parmi la multitude de livres écrits sur le sujet. Je ne pense pas que l’on puisse cerner parfaitement une période de l’histoire en se limitant à une seule source. Donc lisez ce livre-là… mais lisez-en d’autres aussi !
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