Le Jour d’Avant, Sorj Chalandon : descente dans les mines du nord de la France


Le Jour d’Avant – Résumé

Le 26 décembre 1974, Michel a 16 ans. Son grand frère Jojo, 30. Jojo est mineur à la fosse Saint-Amé de Liévin-Lens, dans le nord de la France.

Un modèle pour Michel et une « gueule noire » qui raconte à elle seule tout le patrimoine local : les bruits de la mine, le travail éreintant pour extraire le charbon des profondeurs de la terre, un travail qui abîme les hommes.

Le 27 décembre, tout s’écroule. Des manquements à la sécurité, une quête éperdue de rendement… et un coup de grisou, qui emporte 42 mineurs. Jojo n’est plus. Le grand frère chéri n’est plus là pour servir de boussole au plus jeune.

Et Michel jure qu’il se vengera. Il se vengera, comme le lui a demandé son père avant de mettre fin à ses jours. « Michel, venge-nous de la mine ! » a-t-il lu. Une supplication, un ordre… mais comment respecter cette dernière volonté ?


Auteur.
Taille du livre336 pages.
Note – ★★★★★

Le Jour d'Avant, Sorj Chalandon

Le Jour d’Avant – Critique

Wow. C’est à peu près la seule onomatopée qui me vient en terminant « Le Jour d’Avant » de Sorj Chalandon. Dans ce livre, tout – ou presque – vous marque. La plume, la capacité à capturer la vie des mineurs et l’âme d’une région, la finesse psychologique de l’intrigue, la justesse du ton…

Le jour d’avant, c’est le 26 décembre 1974. La veille de la catastrophe de Liévin qui a coûté la vie à 42 mineurs. Des hommes qui travaillaient dans la poussière de charbon, faisant face chaque jour aux risques d’explosion du grisou, ce gaz qui s’accumule dans les profondeurs de la mine. Des hommes épuisés par un travail éreintant, aux poumons abîmés, pressés par les exigences de rendement qu’on leur imposait.

La mine est cruelle, autant que peuvent l’être ceux qui la dirigent. Ainsi, lorsqu’une veuve reçoit la dernière fiche de paie de son mari mort à la mine, elle constate qu’ils lui ont retiré 3 jours de salaire pour « absence injustifiée ». Il est mort le 27 décembre.

« Au bas de la fiche de salaire, en plus des trois jours dérobés, la direction avait retenu le prix du bleu de travail et des bottes que l’ouvrier mort avait endommagés ».

Parmi ces « gueules noires », un homme de 30 ans, Jojo. Le frère aîné du narrateur, Michel. Un grand frère qu’il admire plus que tout, lui et sa mobylette, lui qui le compare au coureur automobile Michael Delaney dans le film Le Mans.

« Au soir, les mains honteuses de cambouis, il garait son vélo devant le portail de la fosse 3bis et levait les yeux vers le ciel. Les molettes des chevalements tournaient lentement. Elles racontaient le minerai qui monte au jour et les hommes qui descendent au fond. Il avait appris à imiter le souffle des beffrois d’acier. Il s’était entraîné, le regard rivé aux poulies. Il jurait que ce vacarme était l’un des plus difficiles à reproduire. Et l’un des plus beaux.
– N’importe qui peut imiter le chant du coq. Mais le chant du travail, c’est une autre histoire, disait Jojo ».

Michel ignore alors que ce 26 décembre est le dernier jour que son frère passe sur ses deux jambes. Après, c’est l’accident. La mort de Jojo. Et pour Michel, 16 ans, c’est l’enfance qui meurt un peu.

L’ombre de Jojo va alors planer sur l’ensemble de son existence. Michel veut l’honorer et le venger tout à la fois… Faire le deuil et le garder au cœur de sa mémoire.

Les fosses 3 et 3bis des mines de Lens

Sorj Chalandon nous raconte la mine, sa dureté mais aussi la fierté de ses hommes. Il nous raconte Michel et le drame de sa vie, sa vengeance mûrie et si tragique…

Et on ressort de ce livre un peu muet, un peu admiratif, un peu marqué.

Dans « Le jour d’avant », il suffit parfois d’une expression bien trouvée pour saisir la portée d’une situation. Ainsi, lorsque Sorj Chalandon évoque l’hommage officiel rendu aux victimes de la mine après la tragédie, il écrit : « Les caméras de télévision ne fixaient que Chirac. Elles ne nous voyaient pas. Nous n’étions pas le sujet, seulement le décor ».

Il évoque le recrutement de jeunes hommes à peine sortis de l’enfance – qui s’effectuait souvent dans les cafés – en employant cette formule aussi subtile que marquante, en racontant que les cadres de la mine « faisaient passer les jeunes de leur première à leur dernière bière ». Et l’on entend à chaque phrase l’accent du Nord, si reconnaissable.

On réalise aussi que des gestes insensés ont parfois un sens, si complexe et si profond qu’une personne extérieure se révèle incapable de le déchiffrer.

Alors ne passez pas à côté de ce roman !


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2 commentaires sur “Le Jour d’Avant, Sorj Chalandon : descente dans les mines du nord de la France
  • le monde de laura

    Merci pour cette jolie chronique je ne connaissais pas du tout ce livre mais je pense vite le lire. Je m’intéresse beaucoup à tout ce qui touche au mine puisque mon grand père étant mineur j’aimerais découvrir plus sur la vie qu’il menait.

    Laura

    • Marlène

      Je ne sais pas du tout si c’est « réaliste » par rapport à ce métier difficile… mais en tout cas, c’est très bien écrit et ça te transporte vraiment dans cet univers, tu me diras ce que tu en penses si tu le lis !



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