Les victorieuses, Laetitia Colombani : panser des vies fêlées


Les victorieuses – Résumé

Solène, brillante avocate, n’était pas préparée au suicide de l’un de ses clients, sous ses yeux. Un décès qui fait exploser son quotidien, révélant son épuisement professionnel et la rendant temporairement incapable de reprendre son activité.

Son psychiatre lui suggère de se tourner vers le bénévolat pour surmonter son burn-out. C’est ainsi qu’elle pousse la porte du Palais de la Femme, un établissement de l’Armée du Salut qui héberge des femmes en situation de grande précarité et souvent de grande détresse.

A contrecœur, Solène accepte de mettre une heure de son temps au service des résidentes. Sa mission : les aider à écrire leurs courriers.


Auteur.
Taille du livre224 pages.
Note – ★★★★☆

Les victorieuses, Laetitia Colombani

Les victorieuses – Avis sur le livre

Après La Tresse, roman que j’avais beaucoup apprécié, Laetitia Colombani a su à nouveau me convaincre qu’il était agréable de passer du temps en sa compagnie.

Elle nous livre à nouveau une histoire qui met les femmes à l’honneur, avec un style qui déborde d’humanité et de sensibilité.

C’est un roman qui vous emmène de Palais en Palais. Depuis ce jour où Solène, avocate brillante, perfectionniste, impliquée, a vu l’un de ses clients se suicider sous ses yeux au Palais de Justice après une condamnation que personne n’avait vue venir.

Un traumatisme qui agit comme un révélateur, la mettant brutalement face à son épuisement et face à une quête de sens plus profonde : à quoi je sers dans le monde professionnel ? Suis-je là où j’aurais vraiment voulu être si j’étais libérée de la pression sociale ?

Dans le cadre de sa thérapie, le psychiatre qui suit Solène lui conseille de se tourner vers le bénévolat pour se relever progressivement : retrouver le sens perdu, se redonner une valeur en donnant de la valeur et du temps aux autres.

« Sa vie ressemble à une maison témoin que l’on fait visiter. La photo est jolie, mais il manque l’essentiel. Elle n’est pas habitée ».

Solène choisit une mission d’écrivain public au sein du Palais de la Femme, un établissement de l’Armée du Salut qui accueille des femmes en détresse : SDF, en rupture sociale, en grande précarité, victimes de violences conjugales, migrantes, elles ont toutes une histoire bouleversante.

C’est un monde où l’on n’entre pas sans heurts. Ce n’est pas parce que l’on est présent que l’on est accepté. Ces femmes ont toutes connu des parcours de vie dramatiques : trahisons, abandons, la confiance maintes fois donnée a été maintes fois brisée.

Elles sont devenues méfiantes, un peu sauvages, non par méchanceté mais pour se protéger d’une nouvelle gifle. Demander de l’aide, c’est se mettre dans une position de vulnérabilité, dévoiler un pan de soi-même tout en étant « celle qui veut quelque chose ». Une position souvent difficile à accepter pour les personnes en difficulté, ce que les associations savent bien.

« Quinze ans de rue, c’est comme quinze ans de coma, dit la Renée. Lorsqu’on en sort, il faut se réadapter, retrouver chaque geste du quotidien. Cuisiner, dormir dans un lit, faire la vaisselle, changer les draps, autant de défis pour une ancienne sans-abri. Ces mille petits riens qui font la vie, elle les avait perdus, laissés sur le pavé ».

C’est aussi le rappel, à chaque instant, qu’un être en souffrance – qu’il soit pauvre, maltraité, isolé, déraciné – reste un être humain, avec ses désirs, ses rêves, ses envies et ses refus. Une personnalité parfois gommée par les bonnes intentions. Certains veulent aider, mais ils aident l’autre en « devinant ses besoins » au lieu de le laisser les exprimer.

C’est un sujet sur lequel je vois de plus en plus d’associations « éduquer » le grand public. Par exemple, il est souvent bien plus constructif, utile et humain de demander à un SDF ce dont il manque, plutôt que d’aller lui acheter d’office un sandwich jambon-beurre. Même si l’intention est louable, peut-être que la personne a déjà mangé, n’aime pas le jambon, aurait préféré un petit café chaud ou un « kit d’hygiène » basique…

C’est faire en sorte que la précarité concerne avant tout une dimension matérielle et non la dignité de la personne.

Dans Les victorieuses, Laetitia Colombani s’inspire de faits réels – Le Palais de la Femme existe bel et bien et ses fondateurs, Blanche et Albin Peyron, ont eux aussi réellement existé. Elle nous raconte ainsi toute la complexité de la relation d’aide.

Le Palais de la Femme à Paris

Une source de gratification infinie face à toute victoire. Apprendre que ce qui nous semble être un « petit rien » peut représenter le monde entier aux yeux de quelqu’un d’autre. Qu’un refus en apparence insignifiant peut être « le refus de trop ». Que la froideur ou la violence cache souvent une blessure et la peur que quelqu’un l’aggrave. Que l’on s’aide en aidant… mais qu’il est malgré tout nécessaire de trouver une juste distance.

Le roman retrace à la fois l’histoire de Solène, au présent, et celle du couple Peyron, qui a fondé le Palais de la Femme. Deux récits qui s’entrecroisent, entre les convictions de Blanche et Albin Peyron et les incertitudes de Solène, toutes au service d’une noble cause.

Il faut reconnaître un caractère quelque peu prévisible de certains aspects de l’histoire (une pincée d’amour !) mais en dépit de ce constat, j’ai ressenti beaucoup d’humanité dans ces lignes. Elles savent rappeler, sous une plume qui se lit facilement, à quel point donner de son temps et de son attention aux autres a une valeur inestimable.

L’inépuisable Blanche, comme l’imparfaite Solène – jeune femme riche et privilégiée qui se confronte brutalement à une réalité très éloignée de la sienne – contribue à mes yeux à communiquer ce message.


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