Une séparation – Résumé
En Iran, Simin a pris sa décision : elle veut quitter le pays en emmenant avec elle sa fille de 11 ans, Termeh, convaincue qu’elle pourra lui offrir à l’étranger un meilleur cadre de vie.
Son mari, Nader, est radicalement opposé à la perspective d’un déménagement. Bien sûr, il aime sa femme et désire le meilleur pour sa fille, mais il est retenu en Iran par la présence de son père, atteint de la maladie d’Alzheimer et incapable de rester seul à son domicile.
Leur situation, déjà complexe, ne fait qu’empirer lorsque Nader embauche à bas prix une femme qui se dit prête à prendre soin du vieil homme…
Réalisateur – Asghar Farhadi.
Durée du film – minutes.
Note – ★★★★☆
Une séparation – Critique
Le film se déroule en Iran et s’ouvre sur les images d’un couple en pleine demande de divorce devant un juge. C’est l’épouse, Simin (Leila Hatami), qui en a pris l’initiative. Elle a obtenu un visa d’immigration pour quitter le pays, au prix de longues et coûteuses démarches. Elle estime que partir à l’étranger offrirait de meilleures perspectives d’avenir à leur fille Termeh.
A 40 jours de la date d’expiration du visa en question, elle ne parvient toujours pas à convaincre son mari Nader (Payman Maadi) du bien-fondé de ce choix. Faute de pouvoir négocier avec lui, Simin a décidé de demander le divorce afin de retrouver la liberté de prendre ses propres décisions.
En réalité, si Nader s’obstine à s’opposer à ce déménagement, ce n’est pas par désintérêt pour le destin de sa fille mais parce qu’il ne se sent pas capable d’abandonner son propre père en Iran.
Simin : Son père est atteint de la maladie d’Alzheimer, qu’est-ce que ça changerait pour lui que son fils s’en aille puisqu’il ne le reconnaît pas ?
Nader : Son fils, c’est moi !
Simin : Il ne sait même pas que tu es son fils !
Nader : Mais je sais que c’est mon père, moi !
Chacun est convaincu du bien-fondé de ses arguments et en tant que spectateur, on ne peut s’empêcher de constater que les remarques des deux parties sont légitimes. D’ailleurs, le juge lui-même conclut que la demande n’est pas recevable. Il ordonne donc à Simin de « retourner à [sa] vie de famille » et de renoncer à l’idée de quitter l’Iran, puisqu’elle n’a pas le consentement de son mari.
Quelque chose s’est brisé dans le couple et Simin décide d’aller vivre chez ses parents. Nader est si intimement persuadé qu’elle reviendra qu’il cherche à peine à la retenir… Pour l’heure, il a un autre problème sur les bras.
Il ne peut pas demander à la petite Termeh, 11 ans, de s’occuper de son grand-père dépendant, à plus forte raison parce qu’elle passe la journée à l’école. Il ne peut pas lui-même rester tout le temps auprès du vieil homme car il occupe un emploi dans une banque. Alors Nader décide d’embaucher une aide à domicile.
Le salaire proposé n’est pas élevé, la seule volontaire habite loin et vient avec sa fille en bas âge… mais il n’y a guère d’autre solution. Razieh est une femme très pieuse et rapidement, elle se trouve déchirée entre les préceptes de sa foi et les exigences de la situation : elle, une femme, peut-elle déshabiller et changer un vieil homme incontinent qui a mouillé son pantalon, ou est-ce un péché au regard de l’islam ? Peut-elle assumer cet emploi tout en le cachant à son mari Hodjat (Shahab Hosseini), qui ne tolérerait jamais que sa femme travaille au domicile d’un homme seul ?
Razieh prend appui sur les conseils d’une hotline religieuse qui l’aide à résoudre son cas de conscience mais l’on sent bien qu’elle a accepté ce poste en désespoir de cause.
Quelques jours après son embauche, en rentrant du travail, Nader découvre son père à terre, qui est visiblement tombé du lit auquel on l’avait attaché. Lorsque Razieh revient dans l’appartement, Nader entre dans une colère noire et la chasse de son domicile. Peu après, il se retrouve accusé de meurtre…
Comment une telle escalade a-t-elle pu se produire ? Pourquoi Razieh a-t-elle dû accepter un emploi si contraire à ses valeurs ? Nader a-t-il une part de responsabilité dans le décès dont on l’accuse ?
Dans ce film, chaque protagoniste est convaincu d’avoir raison et de faire le bon choix… et, simultanément, se retrouve prisonnier de situations où tout n’est que dissonance et désaccords…
Le film Une séparation d’Asghar Farhadi m’a fait penser à une question philosophique de fond : la vérité existe-t-elle ? Il y a des faits, il y a des interprétations, il y a des manières de percevoir les autres et le quotidien… mais dès lors que rien ne fait consensus, comment établir les contours de la vérité ?
Le jeu des acteurs traduit parfaitement cette dualité entre les convictions intimes stables des personnages… et une réalité qui vient tout chambouler. J’ai été séduite par l’interprétation, qu’il s’agisse de celle des adultes ou de celle des enfants : Sarina Farhadi, la fille du réalisateur, interprète le personnage de Termeh avec une maturité impressionnante pour une adolescente (sa prestation a d’ailleurs été récompensée par un Ours d’argent au festival du film de Berlin).
On plonge dans le quotidien de deux familles iraniennes qui, si elles partagent une même culture et un même souci du bien de leurs enfants, n’ont que peu de points communs : Nader a un cadre de vie agréable, une approche souple de la religion, conduit sa propre voiture et vit dans un grand appartement où il peut offrir un professeur particulier à sa fille ; Razieh vit dans un minuscule espace avec un mari qui croule sous les dettes doit affronter de longues heures de bus pour un emploi mal payé qui heurte ses principes religieux… Simin est une femme moderne et indépendante, Razieh est plus conservatrice et bien plus soumise à l’autorité de son époux.
Une séparation vous laisse avec le sentiment d’être incapable de choisir un camp… Comme si l’on vous présentait des faits et des arguments très recevables, d’un côté comme de l’autre, sans qu’il soit possible de déterminer quelle bataille des sentiments est la plus légitime. A chacun de se faire un avis… ou de conclure à l’impossibilité d’une quelconque décision.
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