Batman : Le Défi – Résumé
La période des festivités de Noël s’ouvre à Gotham City, avec l’allumage du gigantesque sapin de Noël de la ville. Mais l’inauguration, pilotée par le puissant homme d’affaires Max Shreck, est perturbée par l’attaque du Gang du Cirque du Triangle Rouge.
Batman intervient mais ne peut empêcher le kidnapping de Shreck, qui est conduit dans les égouts jusqu’à un homme qui s’y terre depuis de nombreuses années : le Pingouin.
Il n’aspire désormais qu’à une chose : revenir à la surface… et pour ce faire, il entend bien s’appuyer sur la notoriété de Max Shreck, sur lequel le Pingouin possède quelques « dossiers embarrassants » pour faire pression.
Réalisateur – Tim Burton.
Durée du film – minutes.
Note – ★★★★☆
Batman : Le Défi – Critique
Dès la première image du film, on reconnaît la signature visuelle de Burton, avec un univers à mi-chemin entre la peinture et le film. Il sert un épisode inaugural dramatique : un riche couple, les Cobblepot, donne naissance à un garçon difforme, Oswald. Ils décident un jour de l’abandonner, incapables de composer avec sa différence, avec son imperfection dans leur monde parfait.
A Gotham City, ville toujours aussi noire et corrompue que dans le premier Batman de Burton, on ne dépose pas les enfants abandonnés à l’Assistance Publique. On les met dans leur couffin… et on balance le couffin aux égouts. C’est là qu’Oswald va grandir, découvrant le monde humain simplement par le prisme rayé des grilles d’égout.
Là, sous les vestiges d’un zoo abandonné, univers aussi esthétique qu’il est désormais glaçant.
33 ans plus tard, dans le monde qui surplombe Oswald, se joue la même vieille chanson de Gotham : c’est à qui récoltera l’argent et le pouvoir ! La ville s’apprête à entrer dans la période de Noël avec l’allumage du sapin géant… mais ce qui devrait être un événement joyeux réveille au contraire la pire gangrène qui croupit dans les méandres de Gotham.
Lors de l’allumage du sapin, orchestré par le maire et l’industriel Max Shreck (Christopher Walken), le Gang du Cirque du Triangle Rouge sème la pagaille. Un groupe de gens grimés comme des clowns ou comme des acrobates se livrent à une séquence de violence et de destruction, à laquelle Batman (Michael Keaton) met vite un terme, sauvant au passage la secrétaire de Shreck, Selina Kyle (Michelle Pfeiffer), d’une mort certaine. Il ne peut empêcher que Max Shreck soit kidnappé.
L’entreprise de Shreck révèle vite une autre facette de Gotham… avec un débat assez avant-gardiste pour l’époque où le film est sorti, 1992, puisque l’on souligne le machisme ambiant. Dans des réunions entièrement masculines, Selina Kyle sert le café et toute tentative d’intervention de sa part est tournée en dérision. Sans compter les sollicitations commerciales que reçoit Kyle sur son répondeur, mentionnant un nouveau parfum pour « aider les femmes à se sentir femmes ».
Certaines femmes du film s’accommodent de leur rôle : elles occupent les chaussures prévues pour elles, à l’instar de la Reine de Beauté qui lance l’allumage du sapin de Noël, tout en longs cils artificiels et tenue pailletée, assumant la vacuité de sa tâche.
Au milieu du patriarcat ambiant, Selina Kyle cache quant à elle ses blessures. Elle se rappelle quotidiennement qu’elle n’est pas mariée (et le fait lui pèse suffisamment pour qu’elle l’évoque à de multiples reprises, un poids du célibat que l’on comprend aisément quand on voit l’importance accordée aux hommes à Gotham City !). C’est une femme-enfant qui évolue dans un monde rose et girly, avec ses chats, contraste marquant avec son univers professionnel fait de tailleurs stricts et de réunions pincées.
Quand elle croise la route de Bruce Wayne, tout juste rescapée d’une tentative de meurtre car elle en savait trop, en comprenait trop (girly, pas mais idiote !), l’attraction est mutuelle et immédiate.
Au fond, dans Batman : Le Défi, Max Shreck est l’un des rares à ne pas porter de masque. Il est pourri, il a pour projet de s’approprier l’énergie de la ville comme le ferait un vampire en présence de sang… et s’il cache – un peu – ses intentions afin de faire bonne figure, il ne semble pas gêné par le fait que certains, comme Bruce Wayne, voient clair dans son jeu.
Bruce Wayne, quant à lui, apparaît plus que jamais déchiré par la dualité de son identité, face à laquelle le majordome Alfred (Michael Gough) est un pilier plus que bienvenu.
Dans Batman Returns, il y a notamment une dimension érotique, qui crée une tension inassouvie durant l’ensemble du film. Wayne aimerait parfois se laisser aller au plaisir, à l’amour peut-être… mais son identité de Batman se rappelle régulièrement à lui comme une blessure au flanc. Il ne peut pas faire confiance facilement… et parce qu’il porte ce masque, il doit parfois sacrifier la quête d’un plaisir immédiat.
C’est une interprétation intéressante du personnage, décrit initialement comme un playboy. Michael Keaton livre un Batman moins « à l’aise socialement » quoi qu’on le sente habitué aux obligations mondaines. Il est torturé, aussi brillant intellectuellement qu’il est parfois maladroit.
C’est aussi un Batman qui nous rappelle que la créature chauve-souris ne peut pas se résumer à être vue comme « un homme bon ». Batman est violent, parfois tout autant que ses ennemis… et même si c’est au nom de la justice, on le voit tout de même brûler vif un homme avec sa Batmobile.
Batman est faible, comme le sont les autres hommes du Gotham machiste, faible lorsqu’il croise la route de Catwoman et sous-estime son agilité et sa résistance parce que c’est une femme. Faible, quand il laisse ses hormones brièvement prendre le dessus parce qu’une femme en combinaison d’un noir brillant se frotte contre lui.
On lui pardonne cette faiblesse peut-être parce qu’elle s’efface devant la grandeur de sa mission, qui paraît disproportionnée pour un seul homme tant Gotham City respire la pourriture.
Quant à Oswald, alias Le Pingouin, il est à sa manière un révélateur de ce que Gotham cherche à cacher, de ce que les gens enfouissent en sous-sol, de ce dont ils se débarrassent.
« Je suis prêt, Max, je suis là-dessous depuis trop longtemps. Il est temps pour moi de m’élever, de resurgir, avec ton aide, ton savoir-faire, ta jugeote.
Je ne suis pas né dans les égouts, tu sais. Je viens de [la surface], comme toi. Et comme toi, je veux être respecté ! Une reconnaissance de mon humanité élémentaire.
Mais avant tout, je veux savoir qui je suis en retrouvant mes parents et en apprenant mon nom humain. Des choses simples que les pauvres gens de Gotham tiennent pour acquises ».
A quel point le Pingouin est-il sincère ? A quel point manipule-t-il son monde ? Toutes les réponses ne sont pas données dans le film et il est certain que l’homme a l’art de la mise en scène.
Avec Tim Burton, on ne recherche pas le réalisme. Qu’importe si le Pingouin dévore du poisson cru et bave une salive noire comme l’eau des égouts. Qu’importe si l’on peut s’envoler dans les airs avec un parapluie en défiant la gravité, se faire ressusciter par des chats ou survivre à une électrocution.
On se laisse emporter, au son d’une magistrale musique de Danny Elfman, sur une partition qui ne laisse pas indifférent, c’est certain.
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